Subsides LAMAL: la classe politique a les moyens de vous les donner… mais non!

Un salaire direct et socialisé trop bas pour vivre

Les coûts de l’assurance maladie pèsent gravement sur les revenus des classes populaires du canton. Avec la décision de subventionner les coûts d’assurance maladie supérieurs à 12 % puis à 10 % du revenu déterminant des ménages, le pouvoir politique cantonal se voit contraint de reconnaître qu’au moins 36 à 39 % des habitant·e·s de ce canton ne peuvent faire face aux dépenses de santé élémentaire que le système nous impose. À celles et ceux-là s’ajoutent toutes celles et tous ceux qui ne peuvent pas payer les frais résultants de la franchise, de la quote-part et de la prime réelle qui est parfois plus élevée que la prime cantonale de référence utilisée pour calculer le subside.

Nous sommes passés de 190’000 personnes subsidié·e·s en 2013 à plus de 310’000 qui le seraient en 2019. La clé de cette situation désastreuse, c’est un revenu populaire insuffisant et notamment un salaire direct et socialisé trop bas et en baisse. Ce n’est pas simplement le nombre de personnes aidées pour la LAMAL qui l’illustre. On pourrait y ajouter de nombreuses figures sociales précarisées comme les personnes réduites à des salaires de misère, à des conditions de travail précaires et au temps de travail partiel contraint, survivant grâce à l’aide sociale.

Des améliorations limitées pour brider une crise sociale

Poussés à offrir quelques compensations face aux énormes cadeaux fiscaux de la RIE vaudoise, le Conseil d’État et le Grand Conseil mettent en place une soi-disant «politique sociale» qui d’une main organise l’enrichissement croissant de la bourgeoisie et, de l’autre, tente de limiter les éléments les plus criants de la fracture sociale.

Mais il y a, au-delà de cette conjoncture, d’autres éléments qu’il faut mettre à jour ou rappeler. Les améliorations très limitées des subsides LAMAL sont là pour brider une crise sociale, un mouvement de révolte possible d’une partie de la population. Cela est d’autant plus frappant que le syndicalisme institutionnel n’est pas capable d’affronter la question salariale frontalement et se réfugie derrière le grappillage de prestations sociales sensées compenser la défaite salariale générale.

L’automaticité des prestations, c’est l’égalité des droits et vice-versa

Pour les riches, la RIE III est simple: la baisse d’impôt sera automatique et universelle. Pour nous, pour les classes populaires, un des problèmes essentiels que nous avions soulevés il y a quelques mois demeure: une très large partie des possibles subsidié·e·s ne touchent rien de l’aide à laquelle elles et ils devraient avoir droit. Là pas d’automaticité.

L’État, en mettant en place des processus difficiles d’accès aux subsides, produit délibérément une catégorie de hors-droit. Ces personnes, qui sont dans les situations les plus difficiles, les plus fragilisées, les plus précaires, ne touchent pas une aide indispensable. Cela se reproduit maintenant avec les mesures du 12 et du 10 % du maximum du revenu déterminant. Mais avec une situation beaucoup plus claire que dans le passé proche.

Comme l’a expliqué fort bien le Conseiller d’État Broulis, le versement de subsides à toutes les personnes qui y ont droit coûterait «trop cher». Au-delà des effets d’annonce, le pouvoir décide donc de barrer la route à ce droit en imposant aux potentiels bénéficiaires de faire des démarches administratives qui, dans les faits, réduisent les améliorations consenties.

L’automaticité existe déjà: concrétisons là.

Le Conseil d’État n’a strictement aucun besoin de ces démarches. Il reconnaît qu’il possède la liste de «tous les ménages potentiellement éligibles à un subside selon leur dernière décision de taxation d’impôt». Il a toutes les informations sur le revenu déterminant basé sur le calcul des revenus (chiffre 650 de la déclaration d’impôts) et de la fortune. Il n’y a aucun obstacle à faire circuler ces chiffres d’une administration à l’autre, s’il en était besoin, selon les règles de la LHPS (loi cantonale sur l’harmonisation et la coordination des prestations sociales).

L’État possède déjà les informations qu’il exige des subsidiables. Bien sûr, le Conseil d’État affirme qu’il facilite les démarches et accroît le personnel de l’OVAM (office vaudois de l’assurance maladie). Mais ces moyens supplémentaires et l’œuvre de simplification sont dérisoires face à l’avalanche de subsidiables et ne configurent pas le dispositif indispensable pour aider les plus de 100’000 personnes chassées de leur droit par une politique étatique qui ruine délibérément le droit social pour imposer austérités, coupes, dégradation des services publics et économies aux classes populaires.

Disciplinarisation et stigmatisation des classes populaires

Ce qui se passe pour les subsides LAMAL relève d’une politique générale de l’État. C’est également le cas des prestations complémentaires (PC). Il s’agit toujours de construire une stratégie d’exclusion, aussi forte que possible, une classification avec les exigences qui la fondent, et par là même une redistribution en faveur des plus riches, éternels bénéficiaires des remises d’impôts, des cadeaux fiscaux et des subventions.

Il y a donc une importance centrale à faire bouger tout cela. D’abord en disant ce qu’il en est, en montrant quelle politique de lutte contre le salariat et le peuple mènent le pouvoir et la classe politique. En expliquant ensuite ce qui est arraché au salaire social, aux revenus populaires par des subsides LAMAL mutilés. En répétant, avec entêtement et détermination, qu’un droit social, une fois que les conditions matérielles en ont été définies, doit être universel pour toutes et tous les usagers/ères possibles. En d’autres mots, qu’il faut lier le droit social à l’automaticité des prestations: sans celle-ci il ne saurait y avoir d’égalité des droits. L’automaticité des prestations liée à l’égalité des droits, avec la lutte pour une permanente extension du salaire socialisé, constituent une part décisive de la tâche de transformation sociale.

 

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Fissurer l’édifice cantonal de la RIE III

Il vaut la peine ici de souligner combien le «compromis cantonal» PLR-PS et consort, qui avait porté la RIE III vaudoise, est aujourd’hui fortement ébranlé. Sous-estimée dans ses retombées sur les finances communales et le service public dans un premier temps, la RIE III provoque des déchirements dans le bloc au pouvoir et met les hausses d’impôt communal annoncées et prévisibles sous la menace de référendums, dont nous nous réjouissons. Aurons-nous aussi quelques ruptures de collégialité?

Les compensations offertes aux communes par le canton sont insuffisantes. L’avenir de la RFFA incertain. Les finances publiques sont fragilisées, les services publics, les subventions et la politique d’aide sociale sont menacés. Les éléments de déséquilibre politique s’accumulent.

Il suffira qu’une des factions de la classe politique cantonale décide d’ouvrir le feu référendaire ou de saboter tout simplement la mise en application des contreparties de la RIE vaudoise pour que la crise politique s’ouvre. Chouette, profitons-en!

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L'Ami-e du Peuple